la famille ça fait partie...
BROTHERS
de Suzanne Bier
Pourquoi des fois ça marche et des fois ça marche pas ?
Le film précédent de la réalisatrice, OPEN HEARTS, m'avait suffisamment ému, touché, troublé, bouleversé, pour que j'aille sans du tout me poser de questions voir celui-ci...
Et bien, raté.
J'en suis bien marri, car, je le répète, OPEN HEARTS avait été pour moi un des grands films de l'année 2003. L'époustouflant quatuor (deux hommes deux femmes) qui en jouait la superbe et tragique musique est cette fois-ci remplacé par un trio (deux frères et la femme de l'un deux) qui tente hélas de nous rejouer un peu la même partition.
Or, autant ça fonctionnait bien dans un cas (malgré un sujet plus que très casse-gueule, auquel s'ajoutait un traitement "dans les règles du Dogme", autant là ça passe beaucoup moins bien.
Comme si la réalisatrice, se dit-on (je), avait décidé de faire un genre de catalogue exhaustif des émotions humaines (le bonheur, la colère, la honte, la jalousie, l'espoir, l'abnégation, la douleur, le doute...) et souhaité le partager avec nous, in extenso.
Au début un frère gentil soldat propre sur lui avec épouse blonde et sublime et aimante et deux fillettes idem et un autre frère vilain mal rasé asocial violent et qui sort de taule. Puis le frère gentil soldat part en Afghanistan, où il se crashe en avion et est déclaré mort. pendant ce temps-là le frère asocial mal rasé est toujours aussi mal rasé, mais plus sociable, et fait copain-copain avec la blonde et frêle et sublime et aimante épouse. (Ils s'embrassent même un peu après l'enterrement mais rien de plus)
Mais le frère soldat n'est pas mort, il a été fait prisonnier par les vilains barbus. Il a tellement envie de retrouver sa blonde et tendre épouse là-bas au Danemark qu'il est amené à commettre un acte ignoble (je me suis caché la main derrière les yeux pendant la scène oui oui) qu'il va être ensuite amené à doublement regretter puisque les anglais sauveteurs viennent peu après en hélico et bazooka tuer tous les affreux et libérer le gentil frère soldat et donc c'était même pas la peine qu'il fasse ça, le niais (qu'il se dit mais bon tant pis c'est fait).
Quand il revient dans sa maison (où son frère a entre-temps terminé la pose de la cuisine intégrée que lui - le soldat, vous suivez ? - ajournait sans cesse) il n'a qu'une idée en tête : "Est-ce qu'ils ont couché, hein ? " (enfin, deux, avec le remords que provoque le souvenir de l'acte ignoble qu'il a commis) et il va progressivement devenir comme Jack Nicholson dans Shining ("passe moi la batte...")
Il casse la jolie cuisine, il tape sa jolie femme, il fait peur à ses jolies fillettes, il tape aussi son frère qui est encore mal rasé mais est devenu vraiment très gentil, souriant et drôle, presque comme un nouveau papa pour les blondes fillettes... Donc premier papa est plutôt très fâché et l'exprime. Comme Hulk sauf qu'il ne devient pas vert et que sa chemise reste entière... Je m'arrête là, je ne dévoilerai rien de plus du synopsis...
Peut-être que c'était un mauvais soir. Peut-être que j'aurais dû aller voir aut'chose. Peut-être....
Pendant la projection, je me demandais comment la finesse, la subtilité, l'exercice de haute-voltige qui constituaient OPEN HEARTS avaient pu se transformer en cette lourdeur démonstrative, maladroite, gênante, ce regardez comme je les observe bien pendant qu'ils souffrent, en gros plan, le plus près possible, sans artifice, hein ?
Pourtant les acteurs sont plutôt excellents, la musique superbe, les images idem ; j'avais à priori tous les éléments pour être pleinement satisfait en sortant de la salle... Alors, pourquoi ?
Et bien, raté...