L'ORPHELINAT
de J.A Bayona
1) version "dans la salle"
Hmmm, je l'avoue, j'ai -c'est atavique- j'ai une faiblesse coupable pour les films où ça parle en español. Et, comme les films bouh fais-moi peur !, je ne déteste pas non plus, il était normal que j'allasse (que je me rendisse ?) voir le film dont auquel j'ai mis le nom au-dessus de cette chronique, couronné de lauriers (le film, pas moi...) dans divers festivô et qualifié tiroir-caissement de "plus grand succès du cinéma hispanique" (quoi ? plus que Cria cuervos ??? Voix étranglée d'indignation)...
Donc, la séance initialement prévue mercredi à 11h que nous avions cochée ayant été supprimée, c'est à celle d'un peu avant seize heures que j'ai retrouvé mon amie Dominique. Petite salle, quelques adotes (pendant un certain temps j'y restai le seul spectateur mâle), avec du pope-corne (en barils), du soda aux extraits végétaux, et -nouveauté !- des bonbons, avec des papiers qui font frrschrrt frrschrrt surtout quand on essaie de les dépiauter discrètement -et donc encore plus lentement- Le tout-venant du ciné le mercredi aprèm', je suppose...
Bon, le film finit par commencer (avec, juste avant, la bande-annonce, plutôt drôle, du film de Samuel Benchetrit Le jour où je suis devenu gangster, que j'ai très envie de voir) et nos ennuis aussi. d'autant plus que ne cessent d'arriver des groupes d'adotes, dont certaines, notamment, montent jusqu'au dernier rang (le notre) en s'aidant d'une lampe de poche qui s'avéra être celle d'un portable (à la puissance à peu près équivalente à celle du phare de Noirmoutier), lampe qu'elle nous braquèrent joyeusement dans la gueule et sans états d'âme en nous passant devant (et nous piétinant presque) pour aller s'asseoir à l'autre bout du rang, tout en continuant de pouffer et de discuter quasi à haute voix en s'installant (l'installation fut longue), provoquant notre ire, que je ne trahis que par un soupirun peu fort, tandis que Dominique les interpelait d'un virulent "Vous pourriez vous taire ?" auquel elles n'obtempérèrent d'ailleurs pas immédiatement.
La première demi-heure du film se passa ainsi, avec des grappes d'adotes arrivant à peu près toutes les 5 minutes, et nous, essayant stoïquement et tant bien que mal de rester concentrés, quand arriva un tout petit groupe, mixte (ils étaient deux,) s'installant juste un peu en contrebas au bord à droite, et dont il parut assez vite évident, au bazar qu'ils commencèrent à semer, qu'ils n'étaient pas véritablement venus là pour voir le film. Le siège grinçait, aléatoirement aurait-on pu croire au début, puis beaucoup plus rythmiquement... Ca chuchotait, ça faisait je ne sais pas quoi... Z'avaient envie d'un gros câlinou, visiblement, et il avait fallu qu'ils viennent dans notre salle... Argghh.
C'est encore Dominique qui a réagi, en se levant carrément pour aller tancer les apprentis tourtereaux en question (dont l'élément mâle, d'ailleurs, crut ensuite bon de faire son malin en continuant de chuchoter exprès et assez sottement, en commentant le film, mais à qui heureusement la reprise de leurs activités buccales et linguistiques coupa heureusement assez vite le caquet.)
Pendant ce temps, les mangeuses de pope-corne continuaient de popecorner, les mangeuses de bonbons nous prouvaient que leur paquet en contenait extrêmement beaucoup, les celles qui étaient arrivées 20 minutes après le début étaient reparties 20 minutes avant la fin...
On a eu quand même eu droit à un grand moment de calme (ouffff...) où l'on n'a fait que regarder le film (si si, à peine continuait-on d'entendre les frrschrrt frrschrrt ), avant que les lumières ne se rallument. Est-ce par honte, ou par frénésie labiale (j'ai failli écrire "collage intempestif"...), toujours est-il que le petit couple bruyant est resté en place, comme s'il ne s'était aperçu de rien, et n'a pas moufté, elle de dos, allongée en travers de son siège, le string dépassant du jean comme de bien entendu, lui restant invisible, en-dessous affairé comme un pilote de sous-marin avec son périscope...
Nous les avons laissé là de leurs effusions (peut-être y sont-il toujours, d'ailleurs ), et avons traversé la désolation des sièges du bout du rang (ceux des donzelles retardataires au portable) au milieu des pope-cornes renversés et autres détritus picorables et sucrés répandus.
Et c'est Dominique qui a eu le mot de la fin : "C'est la dernière fois que je vais voir un film fantastique un mercredi après-midi dans une salle pleine d'ados !"
2) version "sur l'écran"
Et le film, direz-vous ? Le début est un peu difficile (exposition maladroite, générique idem : Le papier peint déchiré qui révèle les titres est une fausse bonne idée... ) Dans la famille "il y en a des qui cherchent vraiment les problèmes", voici notre héroïne, ex orpheline, (élevée dans ledit orphelinat en séquence pré-générique), qui hmmm années plus tard, revient au même endroit pour y ouvrir un petit "centre d'accueil pour enfants malades", avec son mari et son jeune fils, lui aussi orphelin (mais qui ne le sait pas encore) et malade, et qui se met à voir des amis imaginaires (dont un certain Tomas) plutôt joueurs, mais à l'humour particulier. Le temps d'expliquer les règles du "jeu" à sa maman, le bambin disparaît, et la voilà qui se lance à sa recherche. Elle n'est pas au bout de ses surprises...
Visiblement le réalisateur connaît ses classiques, et, hélas, nous aussi, alors, forcément ça déçoit un peu. Mi-Le pensionnat et mi-Saint-Ange, avec un zeste de Poltergeist, une pincée de La maison du Diable, sans oublier Les Autres... Une histoire (classique) de maison hantée et de fantômes enfantins, que le réalisateur a un peu affaiblie inutilement en multipliant les thèmes et les angles d'attaque (orphelins, enfants morts, vengeance de l'au-delà, farce macabre, mélo familial, placard mystérieux, disparitions, spiritisme, présence invisible...) donc, vue sans déplaisir aucun mais manquant hélas un chouïa d'originalité.
J'avoue que j'ai quand même sursauté quelques fois, quand ça fait tsing! tsing!, et qu'il y a quelques personnages qui marquent : tel enfant avec un sac sur la tête, telle gouvernante inquiétante, telle médium historiquement fripée (quelle émotion de revoir ici la Señora Géraldine Chaplin!), mais le récit est tout de même très emberlificoté pour un résultat, et un final sans -au fond- pas vraiment inattendu : et en plus tss même pas de main sortant in extremis de la tombe pour alpaguer le survivant et le spectateur, du même coup. Ca se voit sans déplaisir, mais bon, il manque quelque chose...
Allons-y donc tant que les places ne sont pas chères, et attendons donc le prochain film du señor Bayona pour savoir si... Mais Viva España!