manger des limaces
LOUISE-MICHEL
de Benoît Delépine et Gustave Kervern.
Poil à gratter. Ou comment la comédie escomptée se transforme en fable grinçante et caustique et acide. Bref, ça agace les dents, ça tord parfois un peu les boyaux. Et c'est, finalement, un film politique. Les réalisateurs ne font pas dans la dentelle, et tirent quasi sur tout ce qui bouge : les hommes et les femmes (et les autres), les jeunes et les vieux (même les bébés!), les malades, les cancéreux, les infirmes, les nains, les patrons, les ouvriers... ça dégomme tous azimuts, dans un esprit typiquement grolandais, (quasiment fou-furieux, donc) avec, toutefois, un petit quelque chose en plus (ce qu'il faut pour passer d'un sketch à un film ?), appelons ça de la suite dans les idées.
Après un début grinçant (dans tous les sens du terme), les présentations sont assez vite faites. Des ouvrières licenciées décident de faire liquider leur patron. Le couple vedette tient ses promesses (Yolande Moreau épatante dans un rôle pourtant spécialement destroy, et Bouli Lanners égal à lui-même : parfait). Une pauvre ouvrière et un tueur à gages nul s'en vont gaiement sur les routes... avec, ça et là, des apparitions de têtes connues (Benoît Poelvoorde, Mathieu Kassovitz, Philippe Katerine, Albert Dupontel -lui si vous voulez le voir il faudra vous armer de patience et attendre jusqu'à la fin du générique de fin-), au milieu d'un vivier humain typiquement grolandais : moche, bête et méchant.
Ca décape, ça tranche jusqu'à l'os, ça n'hésite pas à aller toujours jusqu'au bout (et même un peu plus loin), et, finalement -qui sait ?- ça pourrait finir par donner de bonnes et saines idées de révolte au petit peuple prolétarien et surexploité (là on n'est plus vraiment dans la fiction, n'est-ce pas ?) sauf que, comme dans les Idées Noires de Franquin (avec lesquelles le film n'est pas sans rapport), l'histoire, en gros, n'est hélas jamais finie.
Et si les deux compères nous collent un genre de demi happy-end à rebours, c'est aussi une façon de dire que, si on veut vraiment que ça change, faudrait peut-être relever les manches et y aller plus... radicalement ? Dommage, en tout cas, que l'image soit moche (les couleurs sont pisseuses, les éclairages idem). Mais, finalement, quand on y regarde bien, le monde est-il si joli-joli ?