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lieux communs (et autres fadaises)
22 août 2022

gabriella manzoni

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21 août 2022

claquettes

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LE CHIGNON D'OLGA
de Jérôme Bonnell

C'est grâce à Emma (elle a acheté le dvd et elle me l'a prêté) que j'ai pu voir ce premier film d'un réalisateur que j'aime beaucoup. Comme souvent chez lui, il s'agit -déjà- d'un film choral (carrément polyphonique!) où vont s'entremêler plusieurs histoires sentimentales d'un certain nombre de personnages.
Soit un père (Serge Riaboukine) en stand-by affectif après le décès de son épouse, sa fille (Florence Loiret-Caille), un peu larguée, qui se demande entre autres si elle est lesbienne ou pas et l'expérimente avec sa copine (Clotilde Hesme), son fils (Hubert Benhamdine, qu'on reverra par la suite surtout sur le petit écran) qui est amoureux d'Olga la libraire (qui donne son titre au film) mais qui traîne surtout avec sa copine qui fait des claquettes, Alice (Nathalie Boutefeu) qui elle a des problèmes sentimentaux avec Grégoire (Jean-Michel Portal), dont on entreverra le frère (Grégory Gadebois) à deux reprises. Il y a aussi Pascal (Marc Citti) un ami de la famille, et Nicole (Valérie Stroh) une vieille amie du papa... Beaucoup d'actrices / teurs qu'on connaît et qu'on aime (à part Hubert Benhamdine que j'étais un peu étonné de trouver en tête de générique parce que je ne le connaissais pas du tout) et qu'on est content de retrouver là, et, en plus si jeunes, et donc si attendrissants (le film date de 2001).
Julien, le fils, en pince vraiment pour sa libraire, dont il hallucine la présence un peu partout, au point d'élaborer des stratagème idiots pour qu'elle le calcule enfin (mais bon on ne devait pas dire ça en 2002). L'histoire de Julien et d'Olga c'est un peu l'ossature principale du film (un film où personne n'a de téléphone portable et où les prix sont en francs, quel ravissement, quel bonheur, quelle satisfaction...) mais il y a plein d'autres histoires qui se ramifient tout autour, à tel point que -premier film oblige- on a parfois le sentiment que c'est un petit peu trop rempli, à ras-bord, et du coup que certaines histoires sont traitées plus désinvoltement que d'autres... Mais c'est trop bien de baguenauder avec tous ces personnages (et, surtout, les acteurs qui les incarnent), dans ce qui pourrait être considéré comme un genre d'esquisse de J'ATTENDS QUELQU'UN, qui viendra six ans plus tard.
Ravissant.

aff


 

20 août 2022

(de) mauvaise vie

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LES NUITS DE MASHHAD
d'Ali Abbasi

Je connaissais le pitch, j'avais lu des critiques cannoises qui se plaignaient d'une "violence complaisante", mais je me souvenais du plaisir pris à son précédent -et étrange- BORDER et j'y suis donc allé à la première séance, celle de 18h le mercredi (pendant les ouacances, "nos" films, dans le bo cinéma, ne sont programmés qu'aux séances de 18h et 20h30, c'est comme ça, caca estival oblige...)
Violent, le film l'est (il y a deux ou trois scènes où je me suis caché les yeux derrière ma main oui oui), il est interdit aux moins de 12 ans (oui je suis une âme sensible) et nous conte l'histoire de Rahimi et Saheed. Elle est journaliste à Téhéran, lui père de famille pieux et pratiquant à Mashhad, ville sainte iranienne et lieu de pèlerinage. Sauf que ce n'est pas du tout QUAND HARRY RENCONTRE SALLY (à Mashhad). Elle est journaliste et lui serial killer (il étrangle des prostituées après les avoir ramenées  chez lui sur sa moto, je ne spoile rien puisque le spectateur le sait lui aussi très très vite). Elle enquête (enfin, elle essaie d'enquêter, car, en Iran rien n'est facile pour une femme seule -cf la scène de l'arrivée à l'hôtel-) sur lui et ils finiront par se rencontrer (il l'a ramenée chez lui un soir sur sa moto), elle payera de sa personne et lui se fera arrêter...
Ca pourrait faire l'objet d'un film (la traque / l'arrestation), mais, là, il reste encore une cinquantaine de minutes, on se demande qu'est ce qui va donc suivre, et c'est là que le film devient encore plus intéressant... Comme si tout ne faisait que commencer. Le procès du tueur devient un enjeu politique, et tous les barbus s'y mettent et unissent leurs forces, les gens manifestent en sa faveur, soutiennent qu'il n'a fait que son devoir, "purifier" la ville sainte, son fils passe à la télé pour parler de son père et exposer son modus operandi... Ali Abbasi, de façon assez narquoise, fait en sorte que le spectateur se crispe de plus en plus sur ses accoudoirs au vu des saloperies mises en jeu par les différentes "autorités" (barbues) en place, où il apparaît que tous es mâles se serrent les coudes et s'arc-boutent sur le pouvoir que leur confère le simple organe qu'ils ont entre les jambes. C'est ainsi, c'est la loi, c'est dégueulasse. Qu'ils soient imams, juges, anciens combattants, tous ils montent au créneau. Le spectateur bout, les nerfs se tendent au fil de cette deuxième partie, quand il réalise enfin, comme Saheed, qu'il a finalement été manipulé. (Par un revirement de situation qu'on ne comprend pas vraiment, mais qui nous rappelle, in fine, que l'histoire se passe en Iran (même si le film a été tourné en Jordanie) et qu'en Iran ça finit souvent comme ça..
Et le film résonne étrangement, après avoir vu LA NUIT DU 12, où il est aussi question de féminicide, d'hommes qui tuent et d'hommes qui jugent, et de la phrase " elle a été tuée parce que c'était une fille..."

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19 août 2022

micro 192

(c'est drôle il y a très longtemps que je n'avais pas publié dans cette catégorie, qui s'est avérée faire un peu double emploi avec les "CMFUBJ"...)

 

*

Je marchais dans le fier sillage olfactif de son eau de toilette de jeune homme

*

j'aime pas trop les gens en trottinette
(et au moment où je pensais ça, je me suis dit que je devais aussi sans doute faire partie de certains "J'aime pas trop..." pensés par d'autres gens)

*

Mon aide ménagère (deux heures tous les quinze jours) c'est mon unique (petit) luxe de petit-bourgeois (et je m'y suis attaché).

*

dans le bus, ce rebeu habillé a minima (polo blanc, bermuda fleuri, claquettes de piscine) de l'autre côté de l'allée, qui n'a même pas été fichu de s'endormir pour que je le photographie...

*

(maintenant que j'habite au centre ville) je pense que les rencontres (amoureuses ou pas) c'est comme les places de stationnement qui se libèrent : question de timing, de secondes... on l'a pile-poil au bon moment, ou on la rate

 *

incroyable la quantité de gens qui ont le bras (plus ou moins bien) décoré!

*

"Même l'église était bourrée..." avait écrit un journaliste, à l'enterrement d'Antoine Blondin.

*

J'aime vraiment beaucoup l'écriture de Laurent Chalumeau

*

(terrasse du Lion) un mâle alpha qui parade et tonitrue comme un gros dindon, et sa femelle alpha qui abonde en son sens et lui regonfle les plumes (les trois autres assistent et se taisent).

*

"Les ensileuses, c'est comme des moteurs de bulldozer, ça ne pourra jamais être électrique..." (ledit mâle alpha)

*

"Ninja vert dissident " (Stranger Things ?)

*

je me sentais CONTRARIÉ sans savoir pourquoi, tout un tas de petites contrariétés qui s'empilent s'agglutinent s'agrègent pour composer un bloc indistinct et diffus de contrariété.

*

"Et c'est la vraiment que tu te rends compte que ça monte, c'est quand tu descends..." (P.)

*

La famille Horay habite juste à côté de la famille Jeunet, leurs fils sont copains et jouent ensemble. Comment se prénomme le fils de la première famille ? (* réponse en bas)

*

"Moi, le problème, c'est le souci que j'avais, j'avais du souci ..." (voisine dans le bus, au téléphone, insistante...)

*

"Ce veau a bien compté!"

*

Les raboteurs de parquets et Les rapporteurs de baquets

*

"Si je rentre à jeun, ça veut pas dire que les bistrots n'existent pas...
Pour Dieu, c'est pareil."
(brève de comptoir métaphysique je trouve)

*

ce geste très estival, vu deux fois en deux jours, du mec qui soulève son t-shirt comme pour s'aérer le ventre (à chaque fois c'était un maçon...)

*

jeune homme qui passe dans la rue torse nu, que je qualifie mentalement d'"appétissant" (et je réalise que je le regarde comme le grand méchant loup regardait sans doute les petits cochons...)

*

j'aime les pêches plates parce qu'elles sont plus faciles à manger que leurs homologues joufflues, plus savoureuses, moins farineuses, et, en général, plus sucrées

*

je suis un homme d'habitude(s)

*

* Il s'appelle Rick, parce que c'est "l'ami du petit des Jeunet, l'ami Rick Horay" (transmise par Pépin, mais elle vient du frère de Coralie...)

 

18 août 2022

chalumeau

avant l'été, Pépin m'a prêté

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(2014)

(que lui avait conseillé le libraire de RESERVOIR BOOKS, en lui promettant que c'était encore mieux que Jacky Schwartzmann)

J'ai trouvé ça irrésistible
(les personnages, la construction, les situations, les dialogues, l'humour, le politiquement très incorrect, le dézinguage "tous azimuths"...)

"... Tu as vu, dans le coin, le Weber 310?"
Moktar secoua la tête.
"C'est un barbecue à gaz, convertible en plancha. J'avais le même, avant. Sept cents euros, ça vaut. Bref. Le Weber, tu sais ce que ça veut dire?"
Moktar haussa les épaules avec une moue d'excuses.
"C'est avec ça que cette chienne se fait griller du porc! Du porc qu'elle mange ensuite en tenue indécente avec d'autres Français de souche, comme elle mangeurs de porc. Ils mangent du porc grillé et ils boivent de l'alcool! Du vin, de la bière, du Ricard, du Malibu, de la vodka. Je les vois, là : vieilles putains toutes ridées, chargées d'or, avec leurs seins refaits, trop bronzées. Leurs maris, des gros ventres, rougeauds. Tous buvant du rosé! Du rosé en mangeant du saucisson ou des mini Knackis, taille apéros cocktail! Je les vois! Je les vois! Je les vois d'ici!"
Il attrapa le Uzi sur la table et leva les yeux. "Un jour peut-être Dieu m'autorisera à vider un chargeur sur une de ces orgies diaboliques au barbeuque."
Il brandissait le Uzi, frustré de devoir se retenir de tirer au plafond. Ratata-tata. Ah, sérieux, ç'aurait été si bon. Moktar gâcha tout en disant : "Kader, mon frère - ça va? T'es sûr? Peut-être tu devrais t'asseoir?"

*

“Comment tu l’as appelé ?”
Régis soupira avant de dire, “Bineladan.”
“‘Bineladan’ ? Comment t’écris ça ?”
Régis soupira à nouveau. “B.I.N., plus loin, L.A.D.E.N.”
“Donc Bin Laden, en fait. Pourquoi tu prononces bine-la-dent ?”
“C’est lui qui veut. A cause du 11 Septembre, il préfère que les gens disent Bineladan. Ça pourrit moins l’ambiance quand il fait une résa au restau ou un billet d’avion.”
“Attends, donc, Bin Laden, en fait, c’est Ben Laden – comme Oussama ?”
“Oui mais bon, c’est une famille très très nombreuse. Là, nous, on bloque sur Oussama, mais ils sont je sais pas combien de branches. Des gens tout à fait normaux : BTP, fret, pétrole. On se rend pas compte mais, depuis dix ans, ils souffrent de l’amalgame avec une brebis galeuse.”

*

Georges dit, "Attends, je comprends pas. Sur le papier, la banque, ça dit que j'ai quatre mille euros. Il est où, le reste ?"
Pendant le dîner, ils avaient parlé d'autre chose, mais là, Gisèle dans la cuisine à remplir le lave-vaisselle, Georges et Régis au salon, terminé, plus d'excuses.
Georges redit, "Hein ? Il est où le reste ?"
Régis leva la paume. "Alors, je te dis tout de suite, si tu t'énerves, ça sert à rien. Dès l'instant qu'on s'énerve, c'est plus la peine de discuter. Moi, tu t'énerves, j'arrête et on voit ça une autre fois, un jour où t'es plus calme."
"Mais je suis calme, je te demande juste où est l'argent ?"

j'ai été tellement emballé par l'écriture de ce mec que je suis allé voir illico sur rak*ten ce qu'il avait écrit d'autre, et j'ai découvert qu'il y en avait beaucoup, et j'en ai donc acheté pas mal (chez gibert et momox)

l'auteur publie depuis le début (Fuck, son premier bouquin) chez Grasset, et les romans sont ensuite réédités en Points (sauf deux qui ont eu l'honneur de Rivages)

j'ai donc lu successivement (et un peu dans le désordre, au feeling)

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(2007)

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(2018)

"Les mecs comme toi, en général, ça ne paye jamais. Le restau, vous payez pas. L’avion, c’est frais du contribuable. Les vacances, sur le yacht d’un milliardaire. Vous payez rien. Surtout pas quand vous faites une connerie. Vous faites sauter vos PV. Et même les trucs plus graves, zéro sanction. Au pire, vous faites une loi rétroactive et hop ! Il y a prescription. Si malgré tout, vous vous retrouvez en taule, c’est dans un carré VIP. Mais le plus souvent, pire du pire, vous prenez du sursis. Vous devez vous croire drôlement malins."

*

"C’est juste des actionnaires. Assoiffés de thunes, mais dans les clous. Et là, voilà : même que tu te goinfres en étant en France, si tu peux encore plus te gaver en allant domicilier le siège social en Irlande, mais mon pote, yallah ! Vive la Guinness. Et la tréso en paradis fiscal ? Pas de problème. Et pour la fab, le savoir-faire français, tu peux te le mettre au cul. En Roumanie, ils ont des petites mains qui feront ça très bien pour la moitié du prix. Ah ça c’est sûr que c’est plus souple, tout de suite."

*

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(2017)

"Maître, vous contestez la version officielle ? Par principe, oui. Et alors, selon vous ? Dur de se prononcer, peut-être ne saura-t-on jamais. Je vois ce que vous voulez dire. Oui mais je ne peux pas en dire plus. Et ainsi de suite.
Mais ça, les insinuations torves et sous-airs entendus, ce sera plus tard. En sus et bien à point pour qui aura su attendre. Pour l’heure, dignité et pudeur. Enquête en cours, confiance en la justice et tirelipimpon sur le chihuahua. Heureusement, on prête aux riches des roueries qu’ils n’ont pas toujours et quand il déclare ne pas pouvoir en dire plus, il sent qu’en face, chaînes info, quotidiens ou blogueurs de mes deux ne le croient pas et prennent, Dieu soit loué, son aveu d’ignorance pour une ruse, un élément de langage. L’honneur est ainsi sauf."

*

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(2006)

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(2009)

"La fille, c’est le contraire. La fille qui vient de cité, le patron petit Blanc, s’il l’embauche, comme ça il peut se dire qu’il n’est pas raciste – la preuve : il a une secrétaire ou une standardiste beur – sans se sentir menacé par la virilité de l’Arabe ou du Noir. Et en plus, le patron petit Blanc, il se dit, la Beurette, va savoir, elle va être tellement reconnaissante qu’elle va lui témoigner sa gratitude, s’il demande gentiment. Parfois, ça marche pas gentiment, il demande carrément cash. Tu regardes bien, c’est juste le colonialisme qui se perpétue. Mais hypocrite et ramené en métropole : on humilie les indigènes et on leur pique leurs femmes."

*

""Comme par exemple l'instauration du délit de racolage passif. En gros, tu peux arrêter une fille juste parce qu'elle est sur le trottoir [...]. Si le critère, c'est la jupe ras le moteur et le décolleté Nichon-Parade, bonjour ! Par ici, ils vont rafler les ménagères qui sortent du Huit-à-Huit. Voilà. L'idée, c'était juste de dégager les filles  des beaux quartiers pour faire plaisir aux électeurs, que leurs bonnes femmes puissent recommencer à s'habiller en putes sans qu'on puisse confondre."

*

avec toujours autant de goût pour l'écriture du monsieur.

Là je suis en train de lire

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(2010)

"On va lui faire ça à la Beyrouth, avec un peu de Guantanamo : privation de sommeil, rien à boire, rien à bouffer et pas le droit d'aller pisser pendant huit heures."

*

"C'est normal que ce soit une partouze ?"
Elle dit, "Quoi ?"
"Là, ta fête, en fait, c'est pas une fête. C'est une partouze. Pourquoi tu me l'as pas dit ? T'avais peur que je vienne pas ?"
"Mais enfin, qu'est-ce que tu racontes ! C'est pas une partouze. T'es malade. Qu'est-ce qui te fait dire que c'est une partouze ?"
Du menton, il lui montra tous les bols et petits saladiers disposés un peu partout, remplis à ras bord de préservatifs. Et chaque fois, à côté, une boîte de Kleenex.
"T'as vu le look des bonnes femmes ? Et ça, là, dans les bols, c'est des apéricubes ? C'est pas grave. Juste le truc, c'est de le savoir."
Et là, quand même, la petite avocate blonde percutant et disant : "Oh mon Dieu ! Oh mon Dieu, t'as raison. C'est une partouze. Putain de merde, je le crois pas, ça ! On est à une partouze !"

*

et il me reste encore

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(2021)

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(1994)

L'été 22 aura été pour moi un été très Chalumeau!
(normal, avec la température qu'il a fait!)

17 août 2022

finistère

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LE GOUFFRE
de Vincent Le Port

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Par le réalisateur de l'impressionnant BRUNO REIDAL, un précédent moyen-métrage (50') dans un très beau noir et blanc finistérien, qui suit Céleste, une jeune fille, gardienne dans un camping, qui va partir à la recherche d'une fillette disparue... Une très belle découverte (sur le site de BREF) à mi-chemin entre réalisme et presque fantastique...

16 août 2022

petit manuel philosophique à l'intention des grands émotifs

(j'ai été tellement intéressé par cet entretien que j'ai commandé le livre de la dame, et pourtant il y a "philosophie" dans le titre...)

"Surmonter ses angoisses, ravaler sa colère ou tout faire pour ne pas avoir de regret. Et tout cela, dans le but de nous «réaliser». Ce discours, que l’on retrouve dans bien des méthodes de développement personnel nous incite à la méfiance envers nos émotions. Et si la clé était au contraire de s’y fier pour mieux se comprendre ? Dans son Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs, paru au printemps aux PUF, Ilaria Gaspari étudie une à une les émotions qui nous étreignent : l’envie, l’angoisse, la joie, l’antipathie, la jalousie, la colère ou la nostalgie, pour conclure que toutes, même les plus pénibles à éprouver, nous ancrent dans la vie et nous rapprochent de nos semblables. Et pour nous en convaincre, l’autrice italienne nous parle de son chien, de sa première communion, de ses efforts démesurés pour être sympathique ou de son permis de conduire qu’elle a raté cinq fois. Autant d’expériences qui nous rappellent souvent quelque chose…

Vous êtes arrivée avec à peine cinq minutes de retard et vous vous êtes déjà excusée trois fois… C’est donc vrai, vous demandez sans cesse pardon ?

Quand on me marche sur les pieds, c’est moi qui dis pardon ! Pourquoi sommes-nous si nombreux (nombreuses surtout) à ressentir ce besoin de s’excuser, même quand quelqu’un nous fait du mal ? Il y a quelques années, une de mes plus proches amies a eu un grave accident. Elle faisait son jogging quand une femme qui téléphonait au volant lui a roulé dessus. A l’hôpital, où elle a passé de longs mois, elle m’a confié : «Je me souviens d’une chose : à terre, je répétais “excusez-moi, excusez-moi…”» Ce réflexe commun de s’excuser – tout comme l’attitude inverse de ceux qui sont incapables de demander pardon même quand ils nous ont blessés – tient à notre manière d’occuper notre place dans le monde. S’excuser sans cesse, c’est vouloir compenser le fait d’être là, passer inaperçu, prévenir le mal qui peut nous être fait, se protéger de ce qui nous arrive de l’extérieur, des autres. C’est un peu comme si on s’offrait en sacrifice : je m’excuse de tout et ainsi je ne te mets pas dans la condition de le faire. Mais c’est aussi une manière de détourner l’attention sur des actes qui ne dépendent pas de nous, et parfois de fuir nos responsabilités.

Votre Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs a-t-il pour but de les guérir de ce genre de travers et de leur trop grande sensibilité ?

Bien au contraire ! Les émotions ne sont pas des maladies, et tenter de se soigner ou de se corriger n’a pas de sens. La mode du développement personnel nous trompe lorsqu’elle soutient l’idée que nous pourrions nous réformer à un niveau intime et profond pour correspondre à une image construite, pour être capable d’être plus fort et de nous faire respecter, comme si tout se résumait à un duel entre «moi et le monde». Il est bon au contraire de savoir que nous ne sommes pas responsables de nos émotions. Il n’y a pas à en avoir honte ou à se sentir coupable. Pour Spinoza, il faut au contraire prendre en considération ce que nous ressentons, nos affects, pour enrichir notre connaissance du monde.

La seule responsabilité qui nous incombe est de reconnaître les émotions qui nous traversent et d’apprendre à les lire. Ne pas les nier mais s’y fier pour mieux se comprendre, et comprendre les autres. Ainsi, si l’on envie nos semblables, c’est précisément parce que nous les reconnaissons comme tels. Quant à la jalousie, elle nous rappelle notre insécurité : quelle plus grande angoisse que celle d’être remplacé par quelqu’un d’autre ? L’émerveillement, au contraire, nous fait comprendre que nous pouvons être déstabilisés par ce que nous rencontrons, mais de façon joyeuse… Pourquoi nier tous ces sentiments, qui nous révèlent notre rapport au monde ?

Pleurer, se mettre en colère, exulter… Selon vous, être émotif ne signifie pas être déséquilibré ?

Ni instable ni déséquilibré, mais vivant. Etre vulnérable face à l’expérience du monde est au contraire quelque chose qui nous enrichit. Dès l’enfance, on essaie de mettre sous contrôle les personnes émotives. On dit aux petits qu’il ne faut pas pleurer, qu’il ne faut pas s’angoisser… C’est vrai qu’il faut apprendre à ne pas être totalement débordé par ces émotions, tout simplement pour pouvoir vivre sans être tétanisé. Mais certains individus ressentent les choses avec une intensité particulière et on ne peut pas leur demander de laisser ça de côté. C’est le conatus de Spinoza, l’effort pour se maintenir en vie, quelque chose qui nous caractérise en tant qu’être vivant. Nous devons nous préserver de la mort, et les émotions découlent de cela : la joie et l’émerveillement nous portent, tandis que la rage, la peur ou le dégoût nous avertissent du danger. C’est le signe de notre fragilité, c’est aussi le signe que nous sommes en vie. Les émotifs ont une expérience de vie intense, ils ont aussi la capacité de se mettre à la place des autres.

Ils peuvent en souffrir aussi…

Mais la souffrance aussi fait partie de la vie. Elle ne peut pas être totalement escamotée, il faut pouvoir lui faire face – sauf quand elle devient trop forte bien sûr, où l’aide d’une thérapie ou d’une médication s’impose. La jalousie, l’anxiété, la peur ne sont pas des sensations agréables à vivre. Elles font partie malgré tout de nos expériences ; cela aussi, ça s’apprend. En Italie, j’ai rencontré beaucoup de lycéens pour présenter mon livre. J’ai ressenti très fortement leur envie de parler de leurs émotions, de la jalousie, de la nostalgie et de l’angoisse notamment. Je crois que c’est le signal du besoin d’une sorte d’éducation à l’émotivité, à accepter ce qu’on éprouve même quand c’est une chose de désagréable sur le moment. Sans doute s’agit-il aussi d’une conséquence de la pandémie, qui a été un traumatisme collectif qu’il faudrait aborder, surtout avec les ados, qui ont vu leur vie changer très vite dans une période de questionnements existentiels.

Vous parlez justement de notre «analphabétisme émotionnel». Que voulez-vous dire ?

Notre société est traversée par une tendance ambiguë : d’un côté, il nous faudrait contrôler nos émotions les moins photogéniques ; de l’autre, il faudrait exhiber notre bonheur ou nos larmes sur les réseaux sociaux, hors de toute spontanéité. Nous devons retrouver une relation saine à l’émotion, ni ostentation ni négation. Le bonheur n’est pas un sourire sur Instagram. Le bonheur est une émotion troublante qui se mélange à d’autres, parfois moins aimables : la peur qu’il finisse, l’anxiété de ne pouvoir fixer ce moment, une nostalgie prématurée… Il n’y a pas de pureté de l’émotion. Si je parle d’analphabétisme, c’est parce qu’il faut apprendre à lire ce qu’on ressent, laisser venir les images et les suggestions, comme lorsqu’on lit un roman. D’ailleurs, je crois profondément qu’apprendre à connaître nos émotions, c’est avoir lu. La littérature, la poésie, l’art en général nous aident à déchiffrer nos sentiments comme ceux des autres.

Comment ?

Prenez l’antipathie. Je me suis toujours sentie coupable de trouver antipathiques des personnes dès le premier regard. Alors qu’ai-je fait ? Au lieu de leur tourner tout simplement le dos, je me suis forcée à être plus joviale et plus ouverte encore, pour compenser une émotion que je ne maîtrisais de toute façon pas… Mais à quoi bon, à part me donner bonne conscience ? Dans l’Encyclopédie, D’Alembert disait déjà que l’antipathie est une «inimitié naturelle». Comme celle qui oppose le crapaud et la belette ! Plutôt que la réprimer, il nous faut l’écouter. Ce que nous apprend la littérature, c’est que sans antagonisme, il n’y a pas d’histoire. Nos préjugés et nos défiances nous rappellent que des antipathiques viendront toujours peupler la nôtre, que nous-mêmes pouvons susciter de l’antipathie et que ça n’est pas grave ; bref, que nous ne sommes pas seuls au monde.

Vous dites aussi que l’angoisse est une question qui nous est posée. Mais de quelle question s’agit-il ?

L’angoisse a été regardée par les philosophes de toute humanité. Electre, dans la pièce de Sophocle, en décrit très bien les symptômes : rumination, insomnie, sensation d’oppression… «Pour mes veilles nocturnes, c’est ma lugubre couche entre ces tristes murs qui en sait déjà le secret.» Et comme beaucoup d’anxieux, Electre est incomprise. Pour toute réponse, le chœur lui assène : «Tu n’es pas la seule parmi les humains à qui la douleur se soit révélée, ma fille, et, en face d’elle, tu montres quelques excès.»

L’anxiété est un conflit. C’est un danger qui nous habite et dont on ne voit pas la source. On peut toujours affronter la cause d’une peur et ainsi se montrer courageux. Mais l’angoisse, elle, ne nous laisse pas la possibilité du courage. Elle nous pose des questions qu’on n’arrive pas à se formuler en entier. Elle nous pousse à enquêter, à fouiller, à chercher la source. Elle est un défi. Mon histoire a été tracée par l’angoisse. Depuis l’enfance, j’ai été angoissée. Heureuse et angoissée. On m’a toujours dit que je devais m’en soigner, mais le seul soin que j’ai suivi, c’est l’écriture. Je n’aurais pas commencé à écrire si je n’avais pas eu de crises de panique. Il faut prendre au sérieux son anxiété, elle nous demande une chose : s’isoler du bruit de fond, accepter de ne pas être prêt, prendre le temps de nous mesurer à notre imperfection.

Vous revenez sur une phrase qu’on entend souvent : «Mieux vaut avoir des remords que des regrets.» Pourquoi vous semble-t-elle en partie fausse ?

Elle semble être devenue la devise de notre temps. Les regrets sont presque devenus honteux, ils évoquent une occasion ratée, une chance que nous n’aurions pas saisie, nous qui devons absolument nous «réaliser» ! Le remords, lui, serait du côté du risque et du courage. Mieux vaudrait agir et se tromper que ne rien tenter. Pourtant, le regret comme le remords (ou la nostalgie et bien d’autres émotions que nous ressentons) ont trait au temps qui passe, et ce rapport au temps est le problème principal auquel nous devons faire face dans la vie humaine.

Dans un livre posthume sur l’écriture, Italo Calvino témoigne de ce cruel moment où un écrivain commence un livre : il faut pour cela écarter les milliers d’autres histoires qu’on aurait pu écrire. Si on ne renonce pas à un millier de choses, il n’en arrivera pas même une. Voilà pourquoi le regret est nécessaire. Il est le prix à payer pour pouvoir dire un jour : «J’ai vécu». Regarder les regrets ainsi est libératoire. «Et si j’avais fait ça…». Cela peut faire du bien, aussi, de rêver aux possibles qui ne seront jamais entachés par la mocheté de la réalité.

Vous vouliez écrire un livre de consolation. Pourquoi ?

Cela tient bien sûr au moment où j’ai écrit cet essai, lors de la déferlante de la pandémie en Italie et en Europe, quand nous étions confinés, privés des autres et des distractions, envahis par une grande anxiété sociale. La consolation n’est pas synonyme de thérapie ou de correction. Elle n’efface pas la douleur, mais elle la reconnaît. Nos émotions remontent à une ascendance très éloignée dans le temps. Elles sont tout à fait nôtres, personnelles ; mais elles sont aussi le reflet des émotions éprouvées et vécues par d’autres, qui les ont transmises, communiquées, immortalisées dans des œuvres d’art ou, parfois, simplement racontées de telle façon qu’elles ont laissé une trace.

Ainsi, le mot «nostalgie» a été créé à la fin du XVIIe siècle pour décrire la mystérieuse maladie dont étaient victimes des soldats suisses se battant loin de leurs montagnes, mais Homère décrit déjà très bien cette forme de manque avec Ulysse… On dispose donc d’un énorme patrimoine de voix, de mots, de fables et de mythes qui nourrissent notre vie émotionnelle. Qui nous parlent de l’état de notre cœur, qui nous consolent. Les Essais de Montaigne, les Lettres à Lucilius de Sénèque me consolent et m’apaisent. Ils me montrent qu’on souffre parfois, qu’on pleure, mais qu’on n’est pas seul. Qu’il faut reconnaître qu’on est imparfait, un peu perdu parfois, mais que ce n’est pas la fin du monde." (Ilaria Gaspari / Libé)



15 août 2022

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"J'adore parler de rien, c'est le seul domaine où j'ai quelques vagues connaissances." (Winston Churchill)

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"Être adulte, c'est avoir pardonné à ses parents." (Johann Wolfgang von Goethe)

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juste pour le plaisir...

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" Les hommes oublient toujours que le bonheur est un état d'esprit et non le fruit des circonstances." (Jokn Locke)

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"On se réfugie dans le médiocre, par désespoir du beau qu’on a rêvé." (Gustave Flaubert, L’éducation sentimentale)

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"Il faut apprendre à éprouver la vie comme un long glissement calme. Au moment où l'on y parvient, on est aussi près de la mort que de la vie. "  (Robert Musil, Les désarrois de l'élève Törless)

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"Tu as tout à apprendre, tout ce qui ne s'apprend pas : la solitude, l'indifférence, la patience, le silence." (Georges Perec, Un homme qui dort)

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Un de mes dessins de Sempé préféré(s)
(j'en avais prévu la publication avant d'apprendre son décès)

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"L’art est l’ultime forme de l’espoir." (Gerhard Richter)

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"Dès le début les hommes se sont servis de dieu pour justifier l'injustifiable." (Salman Rushdie, Les versets sataniques)

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"S'il doit y avoir une paix, elle passera par l'être, non par l'avoir. Le but de la vie est de vivre, et vivre signifie être conscient, joyeusement, ivre, serein, divinement conscient." (Henry Miller)

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14 août 2022

ce très cher jean-jacques...

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Ah, Sempé...
Je l'ai découvert en 1968 (oui, c'est très précis) j'étais en 6ème au Lycée G. (oui, je sais, appellation abusive) et, en cours de cathé, on avait l'abbé F., un homme très gentil, mais surtout très malin, qui avait trouvé un truc imparable pour avoir la paix pendant ladite heure : si on se tenait à carreau, si on était raisonnables, à la fin de l'heure, il terminait en nous racontant une histoire du Petit Nicolas. Et on se tenait à carreau. Et je me souviens que j'adorais ça...

Je me souviens avoir ensuite découvert, bien plus tard, que le monsieur qui dessinait Le Petit Nicolas (mais entretemps je l'avais un peu oublié faut dire) faisait d'autres dessins, dans des journaux. Que ces dessins étaient publiés dans des albums grand format (RIEN N'EST SIMPLE, TOUT SE COMPLIQUE, etc.) qui hélas (j'étais adolescent, voire ensuite jeune adulte) coûtaient formidablement cher (200 francs ? ou quelque chose dans ces eaux-là) et qu'il était donc hors de question que je puisse me les offrir (et la Bibibliothèque Municipale de V. ne semblait pas non plus très encline à investir dans ce genre de frivolité dessinée...)

mais j'aimais vraiment ces dessins-là, certains me faisaient rire, mais pas tous systématiquement, des fois juste sourire, et souvent juste rêvasser, un peu béatement (j'aimais beaucoup qd il dessinait un décor de nature pleine page, avec plein de fouillis végétal, avec le ou les personnages riquiquis au milieu, et j'avais aussi un gros faible pour les braves dames en train de discutailler avec dieu, en plein milieu d'une belle église minutieusement détaillée)

un peu plus tard, j'ai découvert que la plupart de ces albums si beaux mais si chers avaient été réédités en folio, et je me suis donc mis à en acheter, avec la frustration du petit format, et le fait que justement le format en question ne permettait pas l'impression de certains grands dessins (ce que fait remarquer François Morel dans son hommage à Sempé publié ce jour dans Libé), mais bon c'était bien quand même d'avoir sous les yeux tous ces dessins avec ces petits personnages seuls face à l'absurdité du monde...)

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un peu plus tard, à l'E.N sans doute, une amie, sans doute, m'a fait découvrir le touchant personnage de MARCELIN CAILLOU

puis quelques années encore plus tard sont venues les rééditions, en format un peu plus grand, dans des ouvrages thématiques, dont le titre commençait toujours par "quelques" : Quelques philosophes, quelques manifestations, quelques romantiques... dont j'ai acquis quelques uns...

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assez régulièrement, par-ci par là, j'avais aussi plaisir à le retrouver sur une couverture de Téléramuche (dont celle-ci, que j'aimais tellement que je l'ai même gardée -je l'ai toujours d'ailleurs !-)



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Fin 2011, je me souviens d'une belle rétrospective Sempé (gratuite) à l'Hôtel de Ville de Paris (vue à l'occasion d'un "Noël à Champlitte à Paris")

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puis plus tard je me souviens avoir hésité un jour à la Foire Aux Livres (Belfort) en trouvant d'un seul coup 5 ou 6 albums grand format, mais assez chers (au moins 30€ pièce), m'être dit "à quoi bon ?" et les avoir reposés...

et, il n'y a pas si longtemps, j'ai fini par acheter l'album grand format ENFANCES, où l'auteur raconte la sienne (pas très rigolote d'ailleurs) dans un assez long entretien, suivi de reproductions de dessins (pleine page, grand format, luxueusement, quoi) sur le thème en question...

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13 août 2022

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LES PROMESSES D'HASAN
de Semih Kaplanoğlu

On est content (très) d'avoir des nouvelles du réalisateur (après son excellent tryptique YUMURTA (2007) -chroniqué, fort enthousiastement,  - , SÜT (2008) et BAL (2010 -l'oeuf, le lait, et le miel-), de retrouver ce qui fait le sel (l'essence) de son cinéma : la nature, les plans-séquences, les rêves,et  la durée  (le film "fait" plus de 2h20, soit 40 minutes de plus que ses films précédents).
S'il fallait ne retenir qu'un élément du film, ce serait le vent (ça tombe bien, j'adore ça) qui est, littéralement omniprésent. Qui souffle sur les champs et les vergers d'Hasan, mais aussi dans sa mémoire et même dans ses rêves (Yusuf, le héros de la trilogie, rêvait déjà beaucoup, et Hasan fait de même...).
Le petit souci que j'ai avec le film, c'est qu'il est difficile de s'identifier (de s'attacher) à un personnage principal qui ne l'est pas trop, justement, attachant. Hasan a des vergers (de pommiers) des champs de tomate, qu'il cultive intensivement (et agressivement) via des arrosages généreux de pesticides (faut ce qu'il faut). Et voilà qu'on lui annonce qu'on va venir planter un pylone en plein milieu de son champ de tomates à lui. Alors que le champ juste à côté reste vide... Ni une ni deux, Hasan va faire tout ce qu'il peut pour faire déplacer le fameux pylone (dans le champ voisin), tout en magouillant à propos d'un autre champ, un verger de pêchers d'un voisin surendetté qui va être saisi par la banque... S'ajoutent à ces spéculations et magouilles des soucis -financiers toujours, l'argent est comme le vent, il est omniprésent- concernant le prochain pèlerinage à la Mecque que vont effectuer prochainement Hasan et son épouse (ils ont été tirés au sort) et pour la préparation duquel il faut régler toutes ses dettes et obtenir le pardon de tous ceux qu'on a offensés. Au boulot! Le film donc reproduit cette dualité : magouilles et grenouillages dans un premier temps, puis recherches des différents pardons, dans une subtile gradation, le dernier étant evidemment le plus fort et le plus difficile à accomplir... Question de vocabulaire : entre "se donner bonne conscience" ou "se racheter une conscience". De l'argent, mais pas toujours.
Tous les spectateurs étaient d'accord à la fin de la séance : "C'est très lent... Mais c'est très beau aussi" (il y a eu un genre de discussion improvisée dans la salle à l'initiative de la caissière quand les lumières se sont rallumées à la fin du générique). La lenteur ne m'a pas gêné (ça serait plutôt un élément positif), même si j'étais un peu réticent au départ (à cause du personnage d'Hasan), mais j'aime finalement d'autant plus la façon dont le film se construit dans la durée.
Des tomates, des pommes, des dettes, des rêves, et du vent, beaucoup de vent... Et, comme dans LES NUITS DE MASHHAD vu peu après, la confirmation du statut endémique de la corruption, y compris (et surtout) chez les juges. Mais bien sûr (hihihi) tout ça se passe très loin de chez nous...

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